Bien qu’écrit dans une Italie Moyenâgeuse et à l’usage d’un monarque, le Prince de Machiavel pourrait tout à fait constituer le parfait manuel de survie en politique pour la France d’aujourd’hui. Son chapitre XVIII notamment décrit, dans des termes à peine caricaturaux, l’attitude qu’adoptent nos gouvernants dans le seul but de se maintenir au pouvoir.
Car cessons d’être naïfs. L’intérêt général est aussi étranger à l’homme politique que la gastronomie l’est aux États-Unis. La belle carrière est devenue une fin en soi, une raison d’être. Peu importe qu’elle se réalise dans l’espace public ou privé, au parti socialiste ou à l’UMP, dans une collectivité ou un super-marché. Le tout est de réussir ! Et si c’est en vendant des cigarettes ou du ketchup, cela reste toujours une réussite ! Le moyen est devenu une fin. La liberté, le bonheur sont devenus des objectifs secondaires, supplantés par l’orgueil, et la reconnaissance des pairs.
Lisons donc ensemble Le PRINCE de MACHIAVEL actualisé par
Chacun admet qu’un homme politique doit être fidèle à sa parole et agir en conséquence. Toutefois, force est de constater que de grandes choses ont été réalisées par des hommes politiques qui n’avaient que faire de la parole donnée et, en revanche, excellaient dans l’art de la ruse. Ces hommes politiques l’ont emporté sur ceux qui s’étaient fixés comme règle de conduite, la loyauté.
On peut s’imposer de deux manières : la loi ou la force. La première est propre à l’homme, la seconde est celle des bêtes.L’homme politique (qui veut durer) doit utiliser les deux. L’homme politique doit être mi-homme et mi-bête, et pour cette seconde moitié, il sera à la fois renard (rusé) et lion (suffisamment imposant pour éloigner la concurrence).
L’art de ne pas tenir ses promesses électorales
Un homme politique n’est pas tenu par ses promesses si leur accomplissement lui serait nuisible. Il pourra justifier cet écart en disant simplement que les conditions qui l’ont déterminé à promettre n’existent plus.
De toute façon, les hommes ne tiennent pas leur parole. L’homme politique étant avant-tout un homme, n’est donc pas lié par sa parole.
L’homme politique doit être rusé
Pour survivre, la ruse est essentielle à l’homme politique. Mais il doit ruser en toute discrétion. Les hommes, sont de toute façon, tellement empêtrés dans leur quotidien qu’ils ne voient rien…
L’homme politique doit donc s’efforcer à se montrer clément, fidèle, humain, religieux, sincère. Mais il faut, en même temps, qu’il puisse montrer les qualités opposées.
La raison d’Etat oblige
L’homme politique a une seule obligation : garantir la continuité de l’État. Il peut, à ce titre, être amené à agir contre l’humanité, contre la charité, contre la religion même. Il doit donc faire preuve de flexibilité ! Telle une girouette, il doit sentir le vent. La réalité commande.
Bien entendu, il doit, tant qu’il le peut, faire le bien. Mais que cela ne l’empêche pas, si le principe de réalité l’oblige, d’avoir recours au mal !
L’art du du paraitre
Lorsqu’on le voit, lorsqu’on l’entend, on doit le croire plein de douceur, de sincérité, d’humanité et, d’honneur.*
Car la plupart des hommes sont attachés aux seules apparences. Peu sont capables de sonder l’âme, de découvrir ce qui se cache derrière le masque. Et ces quelques-uns sont trop peu nombreux pour faire une majorité.
La culture du résultat
Une seule chose importe : le résultat ! Si l’homme politique parvient à accomplir sa tâche qui est, rappelons-le, d’assurer la continuité de l’État, le peuple le jugera honorablement ! Il oubliera volontiers les mises en examen, les tromperies joyeuses, les unes de CLOSER, les financements frauduleux et autres comptes en Suisse… Sa réélection sera assurée.
Un texte manifestement très actuel.
« La soif de dominer est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme. » Machiavel Le Prince
Dernière affaire en date publiée par Le Monde du 31 mars 2014
La ministre Yamina Benguigui suspectée d’avoir menti sur sa déclaration de patrimoine
Yamina Benguigui, la ministre de la francophonie, qui vient par ailleurs d’être élue sur la liste socialiste du Xe arrondissement de Paris, est suspectée d’avoir menti à plusieurs reprises sur sa déclaration de patrimoine.
Jean-Louis Nadal, le président de la toute nouvelle Haute autorité pour la transparence de la vie publique, devait saisir, lundi 31 mars le procureur de Paris du cas de la ministre. Mme Benguigui est accusée « d’omission d’une partie substantielle ou d’évaluation mensongère » de son patrimoine. Elle aurait dissimulé des actions en Belgique d’une valeur de 430 000 euros. Cette fausse déclaration est punie par la loi du 11 octobre 2013 d’un maximum de trois ans d’emprisonnement, 45 000 euros d’amende et d’une peine d’inéligibilité qui peut aller jusqu’à dix ans.
Yamina Benguigui, réalisatrice et écrivain, est actionnaire à hauteur de 20 % et depuis 2005 de G2, une société anonyme de droit belge créée cinq ans plus tôt et dont le siège social est à Saint-Gilles-lez-Bruxelles. Cette société détient à son tour des parts dans plusieurs entreprises, notamment en France dans… Bandits Production, qui a financé l’essentiel des films de la ministre.
UNE « CONVENTION DE PORTAGE »
Nommé en 2008 adjointe au maire de Paris, chargée des droits de l’homme et de la lutte contre la discrimination, Mme Benguigui n’avait pas mentionné cette participation en Belgique, évaluée aujourd’hui à 430 000 euros, mais ce n’était pas alors un délit. L’infraction a été créée en 2011 et renforcée en 2013 lors de l’affaire Cahuzac.
Nommée ministre de la francophonie et des Français de l’étranger le 16 mai 2012, elle ne fait pas mention de cet avoir dans sa déclaration de patrimoine de juin. En revanche, en pleine affaire Cahuzac, elle passe en février 2013 une « convention de portage » avec l’un des associés de G2 et lui vend ses actions pour un euro symbolique, avec la possibilité de les lui racheter au même prix.
L’hebdomadaire Marianne est le premier à avoir découvert l’affaire en mars 2014. La ministre avait alors répondu qu’elle « ne disposait plus d’aucune part sociale au sein de la société G2, de sorte que c’est à juste titre qu’elle n’en a pas fait mention ».
LA CRÉANCE RACHETÉE
Mme Benguigui, qui a perdu entre-temps le portefeuille des Français de l’étranger, a déposé le 29 janvier 2014 une nouvelle déclaration de patrimoine, qui ne fait toujours pas mention de son portefeuille belge. Mais elle a racheté, le jour même, cette créance, ses 430 000 euros, qui devaient lui être versés en trois fois, par souci de discrétion.
Après enquête de la direction générale des finances publiques (DGFiP), la Haute autorité pour la transparence de la vie publique a demandé des explications écrites à la ministre. Un rapporteur indépendant, membre du Conseil d’Etat et qui n’appartient pas à la Haute autorité, a épluché les comptes et déposé son rapport jeudi 27 mars, communiqué le lendemain aux quinze membres du collège de la Haute autorité.
Le collège a décidé lundi 31 mars, à l’unanimité, de saisir le procureur de la République en vertu de l’article 40 du code de procédure pénale, qui impose à « toute autorité constituée » de saisir le parquet d’une infraction. Il s’agit de la première décision publique de la Haute autorité, un an après l’affaire Cahuzac, dix mois après sa création, et trois mois après son installation.
Un article du site EUROPE 1 : Machiavel et la présidentielle
Par Marie-Laure Delorme
INTERVIEW – Le spécialiste de la Renaissance, Patrick Boucheron, revient avec un récit sur Machiavel. Son portrait de l’auteur du Prince passionne par ses résonances avec l’actualité.

Patrick Boucheron, spécialiste de la Renaissance, directeur de L’Histoire mondiale de la France (Seuil), phénoménal succès en librairies, est aussi professeur au Collège de France. Il signe un récit inédit sur Machiavel, riche en leçons sur la présidentielle de 2017. « Lorsqu’aujourd’hui diffère d’hier, on peut prendre appui sur avant-hier pour comprendre ce qui va se passer demain », juge l’historien. Patrick Boucheron estime que Machiavel « peut toujours se lire au présent », car il « retrouve son actualité dans les moments d’orages politiques. »
Lire aussi : Quelques leçons à tirer de l’élection présidentielle
Êtes-vous un historien engagé?
Il existe un pacte implicite entre l’auteur et le lecteur : l’auteur
doit expliciter sa position en répondant à cette vieille question de
1968 : d’où tu parles? C’est une affaire de point de vue – donc une
question machiavélienne. Il y a des sujets où je parle en spécialiste de
l’Italie de la fin du Moyen Âge et d’autres où je fais appel plus
généralement à mon métier d’historien comme, par exemple, avec L’Histoire mondiale de la France.
Je suis donc un historien engagé dans le sens où je suis engagé dans un
travail intellectuel. En ce cas, un historien engagé est bien le
contraire d’un historien militant : il travaille à penser contre
lui-même. En tant qu’historien qui travaille sur l’Italie de la
Renaissance, Machiavel est au centre de ce que j’espère savoir ; mais si
j’y trouve des ressources d’intelligibilité pour penser le présent,
c’est aussi parce qu’il est un maître en inconfort.Machiavel excède donc son époque?
Dès le 16e siècle, on a voulu se débarrasser de Machiavel en inventant le machiavélisme. On cherchait alors à l’enfermer dans son temps, rendant impossible l’actualisation de sa pensée. Machiavel a voulu décrire son époque avec beaucoup de précision, de lucidité, et même de méchanceté puisqu’il le fait de manière désenchantée. Mais c’est bien parce qu’il a posé un diagnostic sur l’aujourd’hui que Machiavel peut toujours se lire au présent. Ce paradoxe est justement au cœur de l’engagement du métier d’historien : on décrit une situation ancienne mais, si on le fait avec probité, elle peut créer des effets de vérité et produire des contemporanéités. Dans Léonard et Machiavel (Verdier, 2008), je racontais ce moment où Machiavel se retrouve, vers 1502-1504, à la cour de César Borgia. Machiavel est alors un homme politique qui n’arrive pas à saisir la nouveauté de la situation : Borgia lui échappe. Son réflexe immédiat est de se plonger dans les Vies parallèles de Plutarque. Le passé lui est donc un secours. Car lorsqu’aujourd’hui diffère d’hier, on peut prendre appui sur avant-hier pour comprendre ce qui va se passer demain.
L’histoire, « magasin de curiosités », où les hommes politiques puisent « sans grand sérieux »
Les hommes politiques français d’aujourd’hui ont-ils une telle culture historique?
Je n’en suis pas certain. Le temps est passé de ceux qui, comme François
Mitterrand, avaient, pour le meilleur et pour le pire, une conscience
politique vertébrée par leur culture historique. La seule chose qu’on
puisse dire aujourd’hui, c’est que ceux qui aspirent à des mandats
nationaux pensent que la France est un pays où un homme politique ne
peut pas encore afficher son indifférence à l’histoire. Depuis la
campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, en 2007, s’est développé un
usage consumériste de la discipline historique. Elle est devenue un
magasin de curiosités, où les hommes politiques puisent ce dont ils ont
besoin, à un moment donné, sans grand sérieux.
Les hommes politiques devraient-ils lire Machiavel?
Machiavel retrouve son actualité dans les moments d’orages politiques,
et voici pourquoi je dis qu’il est un penseur pour gros temps. Ce fut le
cas lors des guerres de religion, au temps des Lumières et de la
Révolution ou dans les années 1930 avec la montée du fascisme. Il arrive
dans l’Histoire que les spectres que l’on craignait le plus prennent
corps. On était prévenu, alerté, on aurait pu voir et pourtant on ne
voit rien venir. Mais il arrive aussi que l’on précipite des
catastrophes en tentant de prévenir les dangers qui s’annoncent. Nous
vivons aujourd’hui, en France, un moment machiavélien. C’est-à-dire un
moment d’indétermination politique et de fatigue démocratique. Machiavel
nous aide à le penser, car il fut républicain et raconte l’effondrement
des républiques sur elles-mêmes. Il constate que les républiques sont
fortes mais oublient le plus souvent de se défendre. Elles faillissent
par négligence. Par excès de confiance ou par haine de soi, elles
baissent les armes. La hantise de Machiavel consiste à ne pas se
désarmer moralement et militairement.
La conquête du pouvoir demande un peu de talent, pas mal de culot et surtout beaucoup de chance
En lecteur de Machiavel, que vous inspire le second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen?
Machiavel n’est pas un philosophe de la conquête du pouvoir, mais de sa
conservation. Il apprend à ne pas se laisser griser par les coups hardis
des créateurs d’Etats. La conquête du pouvoir n’est rien. Elle demande
un peu de talent, pas mal de culot et surtout beaucoup de chance. Mais
conserver l’Etat en revanche – c’est-à-dire se maintenir en l’état et
garantir la grandeur de l’Etat – voilà le grand art politique. Il est en
partie conditionné par les conditions de la victoire. Rares sont les
princes qui ne se laissent pas griser par leurs succès. Machiavel a
décrit leur aveuglement : il fut constamment déçu par eux, et c’est tant
mieux, car un intellectuel qui admire les puissants est perdu pour
l’intelligence.Machiavel, un auteur subversif
Vous présentez Machiavel comme un philosophe de la nécessité pour temps incertain.
Soit par provocation, soit par conviction, Machiavel décroche l’agir
politique de la morale commune. Il peut donc se risquer à des formules
subversives sur l’exercice du pouvoir. Mais il n’a jamais dit que la fin
justifiait les moyens car il sait que lorsqu’on se décide à agir, on ne
connaît pas la fin. On décide dans l’ignorance des conséquences de son
acte. Il faut sans cesse s’ajuster aux conjonctures, ce qui ne veut pas
dire qu’on agit sans règles ni principes. Machiavel est un auteur
subversif, c’est-à-dire qu’il utilise toutes les armes de la subversion,
comme la dérision ou la plaisanterie graveleuse. Il est d’ailleurs pour
cela difficile de le prendre au sérieux. Le Prince peut se lire,
en partie, comme un texte parodique. C’est un livre qui montre aux
républicains jusqu’où les puissants peuvent aller dans le cynisme, mais
ce n’est en aucun cas un manuel de la tyrannie délivrant les hommes de
pouvoir de la morale. Etre tyran ne s’apprend pas. Il suffit de se
laisser aller, de suivre sa pente naturelle, car tout pouvoir mène à son
propre abus.
Merleau-Ponty parle de la philosophie de Machiavel comme d’un « humanisme sérieux », sans cynisme et sans idéalisme.
Le sérieux n’empêche pas de vivre. Machiavel est un auteur énergique et
joyeux qui aime la vie dans ses excès, ses débordements. Mais pour lui,
tout n’est pas possible, tout n’est pas pensable. La fin du Prince en appelle à la responsabilité collective contre la désinvolture.
Le peuple sait ce qui l’opprime mieux que les puissants
La vérité est la grande perdante de l’époque actuelle.
Les problèmes les plus profonds que nous ayons à affronter
politiquement, collectivement, sont des problèmes de langue. Machiavel
recherche la vérité effective de la chose. Il est un lecteur de Lucrèce,
c’est donc un matérialiste. Pour lui, la vérité est dans la chose et
non simplement un effet de beaux discours. Il ne faut pas se laisser
éblouir par la splendeur des mots mais aller droit à la vérité de la
chose. Or le danger est grand quand les hommes de pouvoir emploient des
mots qui ne renvoient plus aux choses. Machiavel n’est pas un
porte-parole, il n’a pas une vision de surplomb. Il ne parle ni au nom
du peuple ni au nom du Prince. Il pense que les dominés peuvent avoir la
conscience de leur domination : le peuple sait ce qui l’opprime mieux
que les puissants. Voici pourquoi il s’agit pour Machiavel de décrire
avec exactitude les choses qui arrivent et de laisser à ceux qui le
désirent le soin d’en tirer les règles d’action.
Lire aussi : Comment Wallerand de Saint-Just justifie l’intox sur un compte de Macron
Machiavel « est du côté de la vitesse, de la jeunesse, de la hardiesse »
Machiavel mélange une expérience des choses modernes et une lecture continuelle des antiques.
Sa vie est coupée en deux par une défaite. Il s’est engagé politiquement
dans l’action pour la République florentine mais, à partir de 1512 et
du coup d’Etat des Médicis, il est exilé et privé de l’exercice de
l’Etat. C’est alors qu’il prend sa revanche dans l’écriture. Les livres
et l’écriture ont été, tout au long de sa vie, non pas un dérivatif,
mais une halte pour retrouver des forces. Machiavel est le nom d’une
intelligence collective : il rassemble les savoirs de son temps. Or
seule la description est révolutionnaire. En créant avec elle des
fictions, Machiavel accumule ainsi des expériences. La description de la
réalité peut servir aujourd’hui, demain, après-demain.
On entre dans les livres afin de retrouver des forces pour vivre
Vous veillez à ne pas enfermer Machiavel dans le politique. Sa lecture est une école de vie.
Il faut rappeler qu’on entre dans les livres non pas pour déserter sa
propre existence, mais afin de retrouver des forces pour vivre. Les
livres sont comme une pierre à aiguiser notre attention au monde. On en
sort l’œil plus vif, pour tout regarder. La lettre d’exil de Machiavel
en 1513 montre que la lecture des antiques ne le distrait pas de la
compagnie de ses contemporains : par la lecture, il reprend pied, il
n’est pas seul, il est pleinement dans la cité. Voici pourquoi il faut
ramener Machiavel dans le rang des écrivains. Le Prince n’est pas
seulement un traité politique. C’est un texte qui cavale, qui essaye de
prendre de vitesse nos propres scrupules. Machiavel a écrit du théâtre
et de la poésie non par désœuvrement mais parce que lorsqu’il s’agit de
travailler sa langue, tout est bon. Ce qu’il avait de plus politique à
faire dans sa vie était aussi irréductiblement poétique : trouver les
mots justes qui renvoient à la vérité de la chose. On ne trouvera pas sa
langue si l’on court dehors toute la journée à rencontrer des gens et
on ne la trouvera pas davantage si l’on reste enfermé dans sa
bibliothèque. On trouve sa langue dans un va-et-vient permanent entre la
solitude et la société.
Vous écrivez : « Et peu importent
alors les défaites car nous savons depuis longtemps l’impossibilité
d’être vainqueurs. » Nous ne sommes donc jamais vainqueurs?
Jamais totalement. Mais en le sachant par avance, on peut s’épargner de
grands désastres. Celui qui n’a jamais connu d’échecs doit apprendre à
redoubler de vigilance avec lui-même, car c’est à la capacité
d’affronter la déception, le désenchantement et la mésentente que se
reconnaissent les grandes intelligences politiques. Machiavel est un
expert en déniaisement, mais ne l’imaginez pas en vieux grognon : il est
toujours du côté de la vitesse, de la jeunesse, de la hardiesse car il
se fait de toutes choses une leçon d’énergie. Voici comment il peut nous
aider à organiser notre pessimisme, en évitant de se complaire dans les
facilités d’un cynisme qui est le confort des nantis.
Par Marie-Laure Delorme
*Un été avec Machiavel, Patrick Boucheron, Equateurs/France Inter, 150 p., 13 euros (en librairies jeudi).
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