J’ai lu pour vous Là où croit le péril…. croit aussi ce qui sauve de Hubert REEVES

Là où croit le péril…. croit aussi ce qui sauve ! “C’est une chose étrange, à la fin, que le monde. C’est par ces mots d’Aragon que Hubert REEVE commence son nouveau livre, au barycentre de l’essai scientifique, du manifeste sur l’écologie et de l’ouvrage philosophique.

J’ai lu pour vous Là où croit le péril…. croit aussi ce qui sauve de Hubert REEVE


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Sans tomber dans l’attitude culpabilisante de nos amis verts, Hubert REEVE replace simple  ment l’homme dans son contexte, à la fois en tant que créature la plus évoluée et la plus destructrice. Il propose un “jugement réservé”, à l’instar d’Heidegger : “Il faut avoir le courage d’affronter la réalité, toute la réalité, dans toutes ses facettes, jusqu’à l’angoisse”.J'ai lu pour vous Là où croit le péril.... croit aussi ce qui sauve de Hubert REEVE

 La Belle histoire ou Le hasard et la nécessité

Hubert REEVE commence par “La belle histoire”, celle qui a conduit à l’homme. En parcourant son premier chapitre, on est dans un premier temps étonné de constater qu’Hubert REEVE s’inscrive dans le camp des créationnistes : il montre en effet que les premiers instants de l’Univers contenaient déjà les germes de l’humanité. Il passe en revue les”Sans ça”, les paramètres indispensables à la vie, dont le réglage fut, dès le départ (Le big-bang), ajusté finement pour permettre l’apparition des atomes, des molécules, des étoiles, des cellules et finalement de l’homme. Ce thème a déjà été abondamment décrit par tous les astrophysiciens vulgarisateurs : Stephen Hawking, Trinh Xuan Thuan, les Bogdanov et d’autres.

Dans cette première présentation, il devient clair que l’homme est le but ultime de la création, la concrétisation d’une idée préconçue dès les premiers instants de l’Univers, l’incarnation d’un projet intelligent, le projet d’un créateur…

Mais à la différence des créationnistes, et dans le sillage de Démocrite (et à l’inverse des Bogdanov), Hubert REEVE démontre que le hasard a également joué un rôle. Sans ce hasard, tout serait pareil, identique ; aucune variation possible ; l’Univers serait homogène et plat, triste. Or, il suffit d’observer l’incroyable diversité de la nature pour se convaincre du contraire. Ainsi, l’impact de météorites a provoqué, par hasard, l’inclinaison de l’axe de la terre. C’est donc par hasard que la terre s’est inclinée et que la vie, permise par l’alternance des saisons, est apparue. La lune serait également la conséquence d’une collision miraculeuse avec une météorite particulièrement impressionnante. Et, sans lune, pas de marées et pas de vie non-plus.

Hubert REEVE propose également l’exemple de l’astéroïde qui, il y a 65 millions d’années, a pulvérisé les dinosaures : sans cet astéroïde, les mammifères (dont l’homme), jusque-là confinés à quelques niches écologiques, n’auraient pu conquérir la terre.

Dans un registre qui lui est plus familier, Hubert REEVE donne l’exemple bien connu de la position miraculeuse de la terre, située à une distance idéale du soleil, et de son orbite quasi-circulaire qui lui assure une température constante.

Si l’homme est arrivé par hasard, il n’est donc pas le résultat d’un dessein intelligent et Dieu est remis à sa juste place.

L’émergence de l’intelligence

Hubert REEVE propose une belle métaphore pour expliquer l’apparition de l’intelligence, voire de la conscience, cette faculté qu’a l’homme (et a priori seulement l’homme) de réfléchir (au sens étymologique du terme) : fléchir sur lui-même comme pour s’examiner de l’extérieur. Cette métaphore s’appuie sur le langage : les mots, ainsi, surgissent de l’assemblage de lettres ; ces mots n’existaient pas lorsque les lettres étaient éparpillées. Il s’agit d’une “propriété émergente”. Même chose pour les phrases, les poèmes qui surgissent de l’assemblage des mots, des idées, des concepts. La complexité (l’assemblage de plus en plus recherché des lettres et des mots) permet ainsi à des propriétés (les phrases, les idées) d’apparaître. Il en va de même de l’intelligence qui surgit dès que le nombre de connexions dans le cerveau est suffisant. L’intelligence est donc l’étape la plus achevée du processus naturel de l’évolution des êtres vivants vers la complexité.J'ai lu pour vous Là où croit le péril.... croit aussi ce qui sauve de Hubert REEVE

L’intelligence : arme de destruction massive

Bien entendu, comme Kant l’avait si bien dit, cette intelligence peut être utilisée aussi bien pour faire le bien que pour faire le mal. Et, en l’occurrence, elle est souvent utilisée pour le second de ces deux objectifs. L’homme, “à cause” de son intelligence est maintenant capable de détruire la planète que Hubert REEVE appelle (Le Petit-père COMBES n’aime pas trop ça ! ) “Dame Nature”. Il reprend l’idée selon laquelle la nature serait vivante et qu’elle serait donc capable de sentir, de ressentir, voire de se venger. On retombe ici dans le travers écologiste, quasi-religieux, qui vise à diviniser la Terre : l’homme devient ainsi un pauvre pécheur, toujours culpabilisé.

Or, il est bien évident que notre cailloux se désintéresse de nous. Il sera encore là bien après nous et aura depuis longtemps digéré notre passage, aussi destructeur soit-il.

Hubert REEVE montre que la disparition des espèces n’est pas nouvelle : il explique qu’elle est, depuis 100 000 ans, concomitante avec la conquête par homo sapiens de nouveaux territoires. Le mammouth, le tigre à dents de sabre n’ont pas disparu, comme on le croit trop souvent, à cause d’une variation rapide des températures. Non ! Il a disparu parce que homo sapiens, grâce à (ou à cause de) son intelligence, est devenu incroyablement efficace dans l’art de la chasse. Toute espèce (y compris d’autres hominidés) présentant un danger ou constituant une réserve de nourriture en a fait les frais, jusqu’à l’extinction.

” Le continent américain a été presque entièrement dépeuplé de ses aborigènes par l’introduction des bienfaits de la civilisation.” Charles DARWIN (ironique)

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Le réveil vert

Hubert REEVE termine sur une note plus optimiste : de nombreux signes montrent la prise de conscience de l’humanité de sa fragilité. L’homme comprend que respecter la terre, ses animaux, les sols, l’eau, l’air est devenue la condition sine qua none de sa propre survie.

Il montre que l’homme progresse : il a su dépasser l’horreur des jeux du cirque, affranchir les esclaves, comprendre les méfaits de la guerre. Il a appris à respecter les enfants (interdiction du travail des enfants), puis les femmes (toutefois pas sur tous les continents encore), les étrangers, les homo-sexuels, son prochain…

Il lui reste à respecter la nature, sous toutes ses formes, comme l’indien le faisait en s’excusant devant la dépouille du bison qu’il venait de tuer. Il s’agit pour Hubert REEVE, d’un “examen de passage” ; d’un examen obligatoire qui, en cas d’échec, nous conduirait aux portes de l’enfer.

Les lois régissant l’Univers (notamment les quatre forces fondamentales) sont identiques en tout point de l’univers et ce, depuis la nuit des temps. Aussi est-il fort probable que l’intelligence ait émergé ailleurs. Et il y a fort à parier que l’examen de passage soit aussi d’actualité dans cet ailleurs, comme si cet examen était une étape à laquelle tout processus d’évolution vers l’intelligence était soumis.