Paul et ses compagnons vivent avec la mort, omniprésente dans le livre, qui s’abat au hasard sur un ami, un inconnu. Ils visitent un camarde agonisant dans un hôpital de campagne ; un camarade certain de son sort ; certain qu’il ne sortira pas de cet endroit lugubre où se mêlent les odeurs de morphine, de sueur et de sang. On pense à ses bottes, qui ne lui servent plus, maintenant qu’il est amputé. Il faut faire le nécessaire pour les récupérer avant son décès, sinon un infirmier s’en emparera ; c’est sûr !
Paul fustige contre les petits-chefs, qui ne sont rien dans le civil ; un facteur ! comme Himmelstoss, mais qui, fort du galon qu’il porte ici, exerce avec jouissance cette petite parcelle de pouvoir que leur a conféré l’armée. Les obus calmeront aussi la tyrannie maladive de ce Himmelstoss.Paul voient ses camardes disparaître les uns après les autres. Il s’interroge sur le soldat d’en face, un ouvrier sans doute, ou un paysan, qui se pose les mêmes
tranchée allemande
questions, qui, lui aussi, voudrait rentrer chez lui !
” Je suis jeune, j’ai vingt ans : mais je ne connais de la vie que le désespoir, l’angoisse, la mort et l’enchaînement de l’existence la plus superficielle et la plus insensée à un abîme de souffrances. Je vois que les peuples sont poussés l’un comme l’autre et se tuent sans rien dire, sans rien savoir, follement, docilement, innocemment. Je vois que les cerveaux les plus intelligents de l’univers inventent des paroles et des armes pour que tout cela se fasse d’une manière raffinée et dure encore plus longtemps. […] Que ferons nos pères si, un jour, nous nous levons et nous nous présentons devant eux pour leur demander des comptes ? Qu’attendent-ils de nous lorsque viendra l’époque où la guerre est finie ? Pendant des années, nous avons été occupés qu’à tuer ; ç’a été là notre première profession dans l’existence. Notre science de la vie se réduit à la mort. Qu’arrivera-t-il donc après cela ? Et que deviendrons-nous ?”
Paul est blessé, ramené à l’arrière. Le contraste est saisissant avec le front assourdissant : ici tout est calme, presqu’ennuyeux. Il ne veut pas évoquer les horreurs qu’il a vues avec sa mère mourante ou sa sœur. Pourquoi les ennuyer avec cela ? Paul ne se fait pas au rythme de la permission. Il redoute que ces amis du front meurent pendant son absence. De retour dans les tranchées, il rencontre un temps des prisonniers russes. Il apprend à les connaître. Certains parlent Allemand. De près, ils ne semblent pas si terribles. Rien à voir avec les discours des officiers ! Ces types faméliques meurent de faim. Comme lui…
Pardonne-moi, camarade : comment as-tu pu être mon ennemi? Si nous jetions ces armes et cet uniforme, tu pourrais être mon frère.
Tant que la mort était anonyme, ça ne lui posait pas de problème. Mais maintenant qu’il a vu ces visages, ces yeux, il ne pourrait plus tuer si facilement… D’ailleurs, le voilà de nouveau confronté avec la proximité de l’ennemi, au fond d’un trou d’obus. Un soldat français surgit ; il lui assène, par réflexe de survie, quelques coups de couteau. Pendant de longues heures, il est face à l’agonisant ; il voit ses yeux se vider, la vie de cet homme s’écouler dans la boue, il se rend compte un peu plus de l’absurdité de son crime. Il tente de sauver l’inconnu mais peine perdue. Il est totalement anéanti :
” Les mois et les années peuvent venir. Ils ne me prendront plus rien. Ils ne peuvent plus rien me prendre. “
L’arrivée des Américains rend la vie encore plus difficile. Tout le monde devient “apte pour le front”, même les estropiés. La guerre a ses propres valeurs… On est vite un lâche et rarement un héros. On s’habille tout neuf pour recevoir le Kaiser, puis on remet ses frusques, bien assez bonnes pour se faire tuer. La solidarité, l’amitié sont les seuls remèdes à l’horreur, ceux qui font tenir le soldat. Mais un jour, Paul est le dernier. L’Allemagne semble se vider de ses habitants. Alors, on envoie au front des plus jeunes, pour des adolescents, qui, inexpérimentés, se font balayer par la mitraille, pour gagner, puis reperdre quelques mètres. Tout le monde sait que la guerre est rude : trop d’Américains tout neufs, trop d’avions, trop de Tommys. Nos cannons sont si usés qu’ils ne tirent plus droit, et parfois les obus s’abattent sur nos positions…Cette description de la fin du conflit va à l’encontre de la propagande officielle de l’armée du Reich (Wehrmacht), notamment celle de Paul von Hindenburg, son commandant en chef, et de Erich Ludendorff, qui estimaient la victoire proche. Le 11 novembre 1918, l’armistice signée par les civils fut critiqué par les deux hommes forts de l’armée. Ils dénoncèrent la trahison des “traîtres de novembre”. Cette propagande fut reprise à son compte par Hitler qui mit, sur le dos des Juifs et des Communistes, la responsabilité de cette trahison : il avait en effet constaté, lors de sa convalescence, la présence de nombreux Juifs dans les ministères, les banques, ces “gens qui profitaient des sacrifices du peuple”.
Traité de Versailles
A l’ouest rien de nouveau : les personnages
Bäumer Paul, Tjaden, Müller, Katczinsky Stanislas, Kropp Albert, Westhus Haie, Himmelstoss Capora, Leer, Kantorek, Behm, Kemmerich Franz, Haie Weshus, Katzinsky, Gerard Duval (le soldat français tué par le personnage principal)
6 commentaires sur “J’ai lu pour vous A l’ouest rien de nouveau de Erich Maria Remarque”
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