J’ai lu pour vous Paris est une fête Ernest Hemingway

Pour quelle(s) raison(s) le roman d’Ernest Hemingway, Paris est une fête (A moveable feast) est-il soudain devenu un phénomène de librairie ? Pour quelle(s) raison(s) les Parisiens sont-ils devenus en 24 heures accros du journaliste américain, correspondant de guerre et bien sûr écrivain ?

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Toulouse-Lautrec

La réponse,  bien entendu, est dans le titre : Paris est une fête. Car Paris, c’est la douceur de vivre, une légèreté qui court le long des avenues, se faufile dans les impasses, s’arrête sur les terrasses de café où les bulles de champagne pétillent au rythme de la musique. Paris, en un mot, incarne tout ce qu’ils haïssent : la vie.

Ces ombres aux kalachnikovs en sont un parfait négatif : tout ce qui inspire au bonheur, ils le haïssent, le brûlent, le salissent, le transpercent de balles. Ils pensent obliger leur Dieu et ainsi s’ouvrir, par pur égoïsme, un Paradis qui n’existe pas. Ils ne le savent pas mais ils sont en fait déjà morts.

Dans son Paris est une fête Ernest Hemingway raconte ses moments parisiens, une parenthèse heureuse en compagnie de sa charmante épouse Hadlay Richardson et son jeune fils Bumby. Nous sommes dans l’entre-deux guerre et Hemingway s’est installé dans notre Capitale où il travaille comme correspondant pour un journal canadien. Il rêve d’écrire des nouvelles. Souvent à court d’argent, son métier de journaliste lui permet juste de survivre, mais il est heureux quand même, vivant de vins frais, de danses et d’amour. Il croque cette douceur de vivre, emporté par le tourbillon de notre capitale. Une seconde Hymne à la joie.

Hemingway nous peint le Paris des années folles, “ses vignettes”, nous parle du mauvais temps, des cafés qui abritent les gens frigorifiés où il s’installe pour écrire, distrait par les jolies filles. On erre dans le jardin du Luxembourg, puis on dévale la rue du Cardinal-Lemoine. Dans de courts chapitres, il esquisse des personnages qu’il rencontre, des auteurs, des artistes, évoque ses relations difficiles avec Gertrude STEIN, une collectionneuse, la gentillesse de Sylvia BEACH, la propriétaire de la compagnie de Shakespeare, une librairie où les expatriés de rassemblent.

Il décrit abondamment Paris, ses habitants, les garçons de café, les pécheurs qui habillent les quais de Seine. Il rencontre Francis Scott Fitzgerald, qui devient un ami., un ami talentueux mais qui manque de confiance, un alcoolique à la santé fragilisée par la compagnie de sa femme Zelda.

Le roman s’achève sur les souvenirs mélancoliques des hivers passés avec sa femme dans les Alpes autrichiennes, à grimper, à skier et à écrire. Cette douceur de vivre s’achève lorsque Le Riche lui trouve des talents pour l’écriture.

Une ode à Paris qui l’enivre. Une invitation aux bistrots, à Dyonisos à la fête, à Épicure et Lucrèce, Montaigne et Camus. Voilà pourquoi les Parisiens se retrouvent dans Paris est une fête. Le Carillon, Le Petit Cambodge, La Cosa Nostra, La Belle Equipe, le Bataclan ont mérité d’Ernest. Leurs attablés, leurs habitués, leurs touristes qui laissaient couler le temps, qui partageaient un Galopin, fêtaient un anniversaire, écoutaient du rock sont les héritiers d’Hemingway, une insulte aux terroristes. Les uns comme les autres sont morts, mais au moins les premiers auront vécu.