
Chère Greta THUNBERG,
J’admire votre volonté, votre inflexible volonté, votre message constant, votre maturité qui nous permet enfin d’être conscient du problème posé par le changement climatique. Je constate aussi que vous avez un problème avec la France. On se demande bien les raisons qui vous poussent à tant de passions tristes, au sens Spinoza du terme, contre notre beau pays. Pourquoi épargnez vous tant, dans votre indignation sincère, les gros émetteurs de CO2 que sont l’Australie, l’Arabie saoudite ou la Pologne ?
Toujours soucieux d’éclairer votre lanterne, j’ai le plaisir de vous présenter, sans vouloir toutefois montrer du doigt, la carte mondiale des mauvais élèves ! Cette carte, qui date un peu je vous l’accorde, montre en effet que, si la France n’est pas la plus vertueuse, elle n’est pas non-plus le diable que vous présentez. Grâce (ou à cause) au nucléaire (75%) et à l’hydraulique (20%), sa production d’électricité est presqu’entièrement décarbonée. La France est, parmi les pays de l’OCDE, celui qui émet le moins de CO2 par habitant.
Alors je repose la question : pourquoi tant de haine envers la Fance ? Pourquoi n’allez vous pas dans les rues de Varsovie ou de Brisbane ? Pourquoi n’allez vous pas crier sur les marches du Kremlin tout votre désarroi contre ce champion du monde de la consommation d’énergie fossile ? Vous faites un diagnostic que beaucoup d’autres ont fait avant vous, peut-être en plus avec ce supplément de puissance qu’autorisent votre jeunesse et votre statut de victime. Je crois, qu’à l’exception de quelques illuminés, on est tous d’accord avec vous : on ne va pas vers le beau. Le problème n’est pas là. Le problème est de trouver des solutions qui seront acceptées. Et c’est autrement plus compliqué chère Greta.

La question sulfureuse des libertés individuelles
Alors OUI, la France peut faire mieux. Dans un récent sondage, 72 % des Français ont même souhaité une rupture claire sur la question du changement climatique. Puisque la France ne peut plus jouer sur la production d’électricité, il faudrait qu’elle trouve d’autres potentiels de réduction. Et c’est là, je pense, que ça va coincer : les autres postes vont immanquablement mordre sur les libertés individuelles de ces mêmes Français.

En effet, pour aller plus loin, il faudra s’attaquer aux à la voiture individuelle, par exemple en taxant très fortement les carburants, les SUV ou les 4×4 (ou même les interdire), limiter aux cas d’urgence l’usage individuel des véhicules, limiter le nombre de kilomètres par an, obliger au covoiturage,… Il faudra limiter la consommation “en général” et, en particulier, celle de viande, de smartphones, de réseaux sociaux, de café et de chocolat, d’avocats et de soja, de fruits hors-saison, de week-end à Rome (sauf en train), de vacances au ski, de grands-prix de formule 1, de congélateurs, de papier aluminium,… Il faudra interdire les logements du type “maison individuelle”, qui consomme de la place et de l’énergie. Enfin, il faudra (comme l’a montré Jean-Marc JANCOVICI) accepter de la décroissance. Et qui dit “décroissance”, dit moins de ressources pour l’Etat, donc moins de service, de personnels hospitaliers, d’agents de la SNCF, de pompiers, de pouvoir d’achat….
Bref, si, dans les attendus du sondage précédent, on avait expliqué au Français les conséquences de la rupture, nul doute que les 72% auraient fondu comme neige au soleil (sans mauvais jeu de mot à l’heure où les glaciers disparaissent).
Mes amitiés.
Je crois que Greta fait partie de tes lectrices. Elle avait jusque là assimilé les articles sur l’indignation et elle vient de lire ceux sur les avantages du statut de victime. Le parterre de chefs d’Etats de l’AG de l’ONU lui a volé sa jeunesse. Snif… Elle peux maintenant s’en retourner sur son voilier vers la Suède, dès que l’équipage l’aura rejointe par avion à New York. O tempora ! O mores ! ça veut dire drôle d’époque.